
22e année N°138 NOVEMBRE - DECEMBRE 2015
Ils ont dit
Philippe Cayla, président d’Europe sans frontières
« Osons l’impensé radical : donnons un passeport européen, non seulement à tous les étrangers en situation régulière, mais aussi à un quota européen global de migrants, demandeurs d’asile ou migrants économiques, décidé en Conseil européen, réparti entre Etats membres par le collège des commissaires, et distribué dans chaque pays par les services de la Commission européenne dans les Etats membres. Le passeport européen “pur” ne donnerait pas la nationalité d’un quelconque Etat membre, mais la liberté d’aller et de venir au sein de l’Union ainsi que le droit de vote aux élections municipales et européennes, offrant au passage, pour ce qui concerne la France, une issue enfin favorable à une promesse cent fois proclamée et jamais tenue ».
lemonde.fr, 14-09-2015
Claude Leggewie, politologue allemand
« Jusqu’à présent, la citoyenneté européenne découle de la nationalité émise par un pays spécifique de l’UE ; il n’y a pas pour l’instant de citoyenneté de l’Union à proprement parler. Les Etats défendent la prérogative qui est la leur d’octroyer (et de retirer) la nationalité, ce qui est étayé par le souhait ancestral, qui n’a jamais été entièrement réalisé et qui est de plus en plus malmené, d’assimiler territoire à culture, ou encore “ethnos” à “demos”... L’immigration de masse remet depuis longtemps cette équation en cause.
Sous l’effet de l’immigration, le pluralisme culturel, ou encore ethnique et religieux, a pris de l’ampleur, et le nombre des personnes qui détiennent la double nationalité – voire plus – s’en trouvera de facto multiplié... Il serait temps d’élargir [la citoyenneté européenne] pour faire de ceux qui la reçoivent les meilleurs défenseurs et partisans d’une Europe unie. »
Frankfurter Rundschau, 23-10-2015
Olivier Klein, maire de Clichy-sous-Bois
« Je suis un maire désemparé quand j’explique à des familles que leurs enfants doivent voter alors qu’eux-mêmes n’ont pas le droit de vote aux élections locales. Tous ces habitants sont des citoyens de notre République.
Leur accorder le droit de vote, c’est réparer les inégalités qui ne sont pas seulement urbaines mais aussi humaines. C’est redonner de la fierté à une génération de femmes et d’hommes, le pouvoir de s’exprimer avec un bulletin de vote. C’est bien sûr, aussi, le moyen de lutter contre l’abstention
populaire. »
huffingtonpost.fr, 26-10-2015
Mauel Valls, Premier ministre français
« Toujours favorable » au droit de vote des étrangers mais il n’y a « pas de majorité qualifiée au Congrès » pour modifier la Constitution.
« Si vous voulez faire un référendum pour changer cela, je vous donne le résultat, c’est-à-dire massivement contre, et en plus nous allons exacerber les tensions autour de cette question. On va dire qu’on a utilisé le sujet à des fins politiques pour faire monter le Front National comme cela a été souvent dit, ça ne me paraît pas utile, je préfère me concentrer sur l’essentiel, et notamment sur les naturalisations. »
Bondy blog, 26-10-2015
« Nous ne pouvons pas mettre en place le droit de vote des étrangers alors il ne faut pas le proposer. Parce que ce n’est pas possible politiquement, constitutionnellement. Et je ne pense pas que ce soit une priorité. Cette promesse, de toute façon, elle ne sera pas mise en oeuvre et je suis convaincu qu’elle ne sera pas reproposée à la prochaine présidentielle. Parce qu’elle tend inutilement et que ce n’est plus le sujet. Il y a une citoyenneté française, une citoyenneté européenne.
Faisons déjà vivre ces deux citoyennetés plutôt que de courir derrière des totems qui ne sont plus adaptés à la réalité du monde. »
Sciences Po, 03-11-2015
Jean-Christophe Cambadélis, premier secrétaire du Parti socialiste
Comprend « que le sujet ne soit pas à l’ordre du jour du gouvernement mais il est toujours à l’ordre du jour du Parti socialiste et il adviendra un jour... Il faut travailler l’opinion [car] obtenir que les étrangers en situation régulière présents sur le sol français depuis plus de dix ans participent aux élections municipales n’est pas attentatoire à la République et est au contraire un moyen de la conforter ».
AFP, 04-11-2015
Razzy Hammadi, député socialiste de Seine-Saint-Denis
Veut « ouvrir un nouveau débat, celui de la citoyenneté. Arrêtons de prendre le sujet par le petit bout de la lorgnette qui est le droit de vote des étrangers, et engageons la discussion sur l’accès à la nationalité... »
Comment ? « Aujourd’hui, un étranger doit attendre cinq ans pour demander la nationalité française. Je propose de réduire cette durée de présence sur le territoire de cinq à trois ans. Cette mesure serait d’autant plus pertinente qu’il faut au moins un an et demi pour instruire un dossier lorsque tous les critères sont réunis. Puisqu’on est bloqué sur le droit de vote des étrangers, ouvrons le débat sur l’accès à la nationalité au bout de trois ans de résidence sur le territoire national. »
leparisien.fr, 04-11-2015
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