4 euros 20e année  N°121 JANVIER FEVRIER 2013


 

France : Campagne droit de vote 2014

 

Le collectif Votation citoyenne, SOS Racisme, le Conseil français de la citoyenneté de résidence, la CFDT, la CGT, la FSU... Une centaine d’associations, partis politiques et syndicats se sont réunis en décembre dans un nouveau collectif « Droit de vote 2014 » et veulent interpeller le président de la République et les parlementaires sur l’urgence d’engager le processus de révision constitutionnelle permettant d’instaurer le droit de vote et d’éligibilité pour les résidents étrangers dès les municipales de 2014.

 

La prudence de l’exécutif

Depuis septembre, les signaux envoyés par le président de la République et le gouvernement ne cessent d’inquiéter les défenseurs du droit de vote des étrangers (voir La Lettre n° 120).

Interrogée par France 3 le 18 septembre, la porte-parole du gouvernement, Najat Vallaud-Belkacem, tout en réaffirmant la justesse de la réforme et des efforts pour convaincre les trois cinquièmes des parlementaires, dit que cette réforme interviendra « avant la fin du quinquennat ». Un membre de la commission Jospin sur la rénovation de la vie politique constate avec regret que le droit de vote des  étrangers a été écarté de la lettre de mission de cette commission (voir Julie Benetti dans « Elles et ils ont dit »). Le 3 janvier 2013, après le premier conseil des ministres de l’année, le Premier ministre, Jean-Marc Ayrault, présente le programme de travail du gouvernement pour les prochains mois et ne dit pas un mot sur le droit de vote

des étrangers.

Le 8 janvier, le ministre délégué à la Ville, François Lamy, lors de la présentation de ses voeux à Clichy-sous-Bois, affirme poursuivre le combat de persuasion des parlementaires pour que « le droit de vote des étrangers soit une réalité avant les élections municipales de 2014 » tandis que le ministre de l’Intérieur, Manuel Valls, sur le plateau télévisé de Canal +, annonce que le droit de vote des étrangers n’est plus d’actualité et qu’il va, par contre, s’efforcer de favoriser l’accès à la nationalité française. Le 28 janvier, Jean-Marc Ayrault annonce qu’il consulte les groupes politiques sur la révision constitutionnelle et qu’il prendra une « initiative » imminente sur le sujet.

Nous reviendrons sur cette déclaration et ses suites dans notre prochain numéro.

 

Le Parti socialiste passe à l’offensive

Le président du groupe socialiste à l’Assemblée nationale, Bruno Le Roux, affirme sur France inter le 18 novembre qu’il va s’employer à « aller chercher des députés qui vont pouvoir permettre que ce texte passe ». Le 23 novembre, le député Pouria Amirshahi insiste : « On ira chercher les voix avec les dents... On les appelle tous individuellement pour les convaincre...

Si on n’y arrive pas par cette voie, on en passera par la pédagogie d’opinion et pourquoi pas par le référendum. »

Le 10 décembre, Harlem Désir, premier secrétaire du Parti socialiste, annonce que son parti lance une campagne en faveur du droit de vote des étrangers et adresse un courrier aux parlementaires pour leur demander de défendre une loi sur le sujet.

Le 11 décembre, Thierry Mandon, porte-parole des députés socialistes, affirme :

« Nous sommes en attente et nous avons la volonté que le processus démarre... Nous souhaitons que le gouvernement engage, par le dépôt d’un projet de loi, le débat parlementaire. » Le lendemain, le ministre des Relations avec le Parlement, Alain Vidalies, estime que la mobilisation des députés socialistes « va dans la bonne direction » mais qu’un projet de loi ne sera inscrit « en priorité » qu’une fois assuré le soutien requis de 3/5e des parlementaires.

 

L’état des lieux en Europe

La journée d’études organisée à la Maison de l’Europe le 14 décembre par le Centre d’études et de recherches internationales (CERISciences Po) et l’Association européenne de défense des droits de l’homme a permis de faire le point sur les expériences étrangères de mise en place du droit de vote et de l’éligibilité des étrangers non communautaires. Catherine Wihtol de Wenden a rappelé la création

en Belgique dans les années 70 des premiers comités consultatifs pour la représentation des étrangers, à un moment où les politiques prennent conscience que les travailleurs étrangers ne retourneront pas dans leur pays d’origine, et alors qu’ils font venir leur famille et qu’ils obtiennent l’égalité des droits dans les entreprises. Revenant sur l’exemple des pays d’Europe où les étrangers non communautaires ont le droit de vote, la chercheuse du CERI constate que l’accès à ce droit ne favorise pas le communautarisme. Hervé Andrès, du CNRS, a dressé un tableau mondial de la situation : un pays sur trois a accordé entièrement ou partiellement le droit de vote local aux étrangers. Dans les pays qui ont accordé ce droit de vote, la naturalisation est plus importante et, pour lui, l’accès au droit de vote aux élections locales est un chemin vers l’accès à la nationalité. Dirk Jacobs, chercheur à l’université libre de Bruxelles, observe lui aussi que le droit de vote aux élections locales est un instrument pour l’accès à la nationalité, qu’il est perçu très

positivement par les étrangers et qu’il n’a pas eu d’effet bouleversant dans la composition des majorités locales. Il a eu par contre un effet positif dans la reconnaissance des besoins de certains quartiers et on observe à Bruxelles un meilleur accès aux services publics, par exemple pour la collecte des déchets, de ces quartiers.

 

Le collectif Droit de vote 2014 en campagne

Même si pour certains le sujet n’est pas d’actualité, en réalité le droit de vote des étrangers ne quitte plus l’actualité depuis plusieurs mois. Quelques exemples supplémentaires à ce qui a déjà été relaté ci-dessus : le 2 décembre, c’est le thème de l’émission d’une heure sur France Inter « Cause commune, tu m’intéresses » ; le 3 décembre, dans Libération, lettre ouverte au président de la République pour le vote des étrangers de la sénatrice Esther Benbassa, du député Sergio Coronado et de cinquante personnalités ; les 7 et 8 décembre à Grenoble, à l’initiative du Conseil consultatif des résidents étrangers, débat, marche et votation citoyenne ; le 8 décembre, conférence de presse et appel de SOS Racisme; le 22 décembre, émission de télévision « Étranger, citoyen ou les deux ? » sur la chaîne parlementaire LCP ; dossier de l’Humanité du 7 janvier « Droit de vote aux élections locales : on vit ici, on bosse ici, on vote ici » ; carte de voeux du groupe Europe écologie - Les Verts (EELV) du conseil régional d’Ile-de-France : « En 2013, provoquons un électrochoc citoyen, donnons le droit de vote aux étrangers. » Une campagne du collectif Droit de vote 2014 se met en place pour le premier trimestre 2013.

Une conférence de presse le 13 décembre a lancé une pétition qui, fin janvier, réunit plus de 20 000 signatures. Des réunions publiques, des contacts avec les parlementaires, des affiches et deux temps forts de signatures de pétitions début février et fin mars sont programmés.

 

Tous renseignements auprès de : secretariat@droitdevote2014.org

ou au 01 56 55 51 08.

 


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